Yves Barou président de l’Afpa (Association pour la formation des adultes), alerte sur les enjeux de la réforme à venir de la formation, dans une interview du Figaro publiée le 20 octobre.
Synthèse de l’interview: Le système de la formation professionnelle actuel ne remplit pas sa mission. En effet, il ne profite pas à ceux qui en ont le plus besoin (les personnes les moins qualifiées/les demandeurs d’emploi) et ne forme pas suffisamment vers des métiers d’avenir. La réforme de la formation menée par les organisations patronales, syndicales, les régions et l’État, représente un défi majeur pour assurer la pérennité et l’accès des formations clés, tout en limitant les gâchis financiers.
» LE FIGARO.- Quel doit être l’objectif premier de la nouvelle réforme de la formation professionnelle que négocient les partenaires sociaux?
Yves BAROU.-La formation professionnelle doit avant tout avoir une logique économique: fournir aux entreprises les qualifications dont elles ont besoin aujourd’hui et demain. Tout en faisant attention à ce que l’accès à la formation se fasse sans discrimination, en particulier pour les moins qualifiés et les demandeurs d’emploi. Malheureusement, le système perd souvent de vue cette boussole de l’emploi et ne remplit pas bien sa mission économique. Trop d’entreprises rencontrent aujourd’hui des difficultés de recrutement. Ce sont autant d’emplois qui, peu à peu, s’évaporent. Les sociétés qui peinent à recruter finissent par installer leur production ailleurs. À horizon 2020, d’après McKinsey, notre pays risque de perdre de ce fait plus de 2 millions d’emplois, tout en ayant 2 millions de chômeurs. Un vrai désastre national! Le plan de 30.000 formations qui conjugue les efforts de tous les acteurs est une première réponse à cette contradiction.
Est-ce parce que de nombreuses formations ne sont pas adaptées? On pense aux stages «macramé» ou «course en sac»…
Le problème est plus profond que les abus ou malversations souvent cités. La pression sur les budgets conduit à sélectionner des formations certes moins chères, mais plus courtes, de qualité moindre et moins ciblées sur l’objectif de qualification et donc d’emploi durable. Or, en cette période de mutation, les Français, et notamment les chômeurs, doivent accéder à des formations vraiment qualifiantes. La formation est alors un investissement. Par contre, si elle devient low-cost, elle devient une pure dépense qui, même si elle est moins chère, est un gâchis car souvent inutile.
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Y a-t-il un autre problème?
Oui, les formations à rayonnement national, souvent liées aux filières d’avenir, ne sont plus assez proposées aux chômeurs. Pour certains métiers, il n’existe que peu de centres de formation en France car les plateaux techniques sont chers. Par exemple, pour former des techniciens d’intervention du froid industriel, il y a 3 centres en France, 2 de l’Afpa à Montauban et Alençon, et un autre en région parisienne. Les besoins en main-d’œuvre sur ces métiers sont limités en nombre mais essentiels pour faire tourner les entreprises. Pour que ces formations clés vivent, il faut permettre aux personnes de se former facilement ailleurs que dans leur région. Cela suppose un accompagnement en termes de restauration et d’hébergement, mais aussi des financements appropriés qui ne peuvent pas se limiter à la bonne volonté de la région d’accueil sur laquelle aujourd’hui pèse cette charge. Je tire la sonnette d’alarme sur ce point car ces centres à rayonnement national forment précisément aux métiers d’avenir! En négligeant ce type de pôles, l’Espagne et l’Italie ont accéléré leur désindustrialisation. »
Lire l’intégralité de l’interview: http://www.lefigaro.fr/formation/2013/10/20/09006-20131020ARTFIG00117-barou-la-formation-professionnelle-ne-remplit-pas-sa-mission.php
Source: Le Figaro